Le paradis TERRESTRE... Si on s'y mettait ?

mercredi 21 septembre 2011

Gravats


Il a baissé la tête et n'a pas voulu voir.

Hier, le building voisin s'est effondré, provoquant un nuage de poussière âcre qui l'a bousculé dans sa routine, mais aujourd'hui, il est de retour dans ses habitudes, un tas de gravats en plus, un building voisin en moins.

Comme elle est forte, l'habitude, comme elle est rassurante! Il s'y accroche et s'y réfère, c'est grâce à elle qu'il est heureux. C'est l'habitude qui le protège de la peur. Pour ne pas avoir peur, il est donc important que tout événement soit intégré dans sa normalité, car ce qui est normal ne fait pas peur.

Après l'avion dans le building, il y a eu la chasse aux terroristes. C'était rassurant que des gens courageux (pas lui) mettent des habits de couleur uniforme et s'en aillent, loin, chasser le terroriste planqué dans la montagne responsable de l'avion dans le building. Lui pouvait continuer sa routine. Ouf!

Ensuite, il n'a pas bien compris, il y a eu d'autres guerres, loin également. Il sait que la politique lui échappe, à lui citoyen béotien, il laisse faire ceux qui savent. Il va travailler tous les jours contre un salaire qui s'amenuise avec le temps. Quoi? "Pas normal, il devrait plutôt augmenter?"… Si, si, on lui a expliqué que la guerre coûte cher et qu'elle est livrée pour les protéger, lui et sa routine, alors il faut qu'il sacrifie un peu de ses gains pour contribuer à payer les uniformes de couleur uniforme.

Il veut bien, lui, donner un peu, si c'est pour qu'il continue à se sentir en sécurité. Il fait confiance à ceux qui le gouvernent, c'est normal. Il baisse la tête et suit ses habitudes. Il n'a pas peur, il est heureux.

On lui a suggéré de mettre de l'argent en bourse pour s'assurer d'en avoir pour ses vieux jours. Il a trouvé l'idée excellente. L'angoisse du manque et de la vieillesse, à peine générée, s'est éloignée. Il avance ainsi, toujours heureux et confiant. Quand le système monétaire s'est mis à trembler, il a baissé la tête et n'a pas voulu voir. Il ne regarde, en biais, que le cours de ses actions, qui est toujours bon, et c'est bien. Son monde rassurant perdure.

Il avance, tête baissée, sur le trottoir devant le building où se trouve la compagnie qui l'emploie. Il ne sait pas encore que ce matin, à l'aube, la bourse mondiale a collapsé, c'est la banqueroute générale, et son boss a décidé de se passer de ses services…

Il passe à côté des gravats sans les voir, comme tous les matins, dans sa morosité habituelle et si rassurante.

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