Le paradis TERRESTRE... Si on s'y mettait ?

samedi 24 septembre 2011

La fin du monde


La crise avait exacerbé les peurs, et la peur est toujours mauvaise conseillère, c'était bien le résultat escompté. Au sommet, ils étaient ivres de satisfaction, de suffisance et de pouvoir. Rien n'allait les arrêter, ils étaient les maîtres du monde. La masse ignorait tout de tout, ils avaient gardé les avancées technologiques les plus performantes pour eux et caché la connaissance. «S'ils savaient, ces pauvres idiots, tout ce qui était possible à ce jour!». Pauvres naïfs dont la bonté les empêchaient de voir le mal.

Ils étaient arrivés là grâce à des alliances au noir, des collaborations occultes. C'était une fraternité diabolique qui avançait de conserve et acquérait toujours plus de puissance. Ils détenaient tous les fils du pouvoir, ces marionnettistes suprêmes. Ils avaient compris de longue date les mystères de la vie et leur premier accomplissement, une règle indispensable: tenir la population dans la plus grande ignorance de ces secrets. C'était leur plus grande fierté que celle d'avoir réussi à convaincre des populations entières que l'humain se trouvait dans un état de survie permanent. Le plus grand piège dans lequel tous étaient tombés fut faire croire qu'il n'y avait pas assez à manger pour tous sur cette gigantesque planète opulente. Ils vivaient au milieu des cultures et des élevages, et ils avaient faim. Quel gag! Cette chose-là les faisaient toujours autant rire et générait encore plus leur mépris pour les humains, eux qui ne l'étaient pas.

Ils étaient absolument sûrs de leur victoire, tout en ignorant leur but, car il n'y avait aucun autre plan que "plus de pouvoir". Ce qui était un plan stupide, dénuée de toute intelligence. Ces êtres-là n'étaient pas intelligents, seulement malins et compulsifs, leur dessein commun était de dresser la masse les uns contres les autres. C'était un petit groupe d'illusionnistes qui maintenaient le mensonge: tout et n'importe quoi pour éviter que les gens ne se rassemblent et prennent conscience de leurs capacités. Ils n'avaient aucune vision à long terme, juste des plans B, puis C, puis D… à mesure que les plans A s'épuisaient.

La seule vraie stratégie était de maintenir la peur et c'était si facile! Dès qu'ils avaient peur, ces animaux humains, ils se cachaient, se privaient, se méfiaient de leurs voisins, c'était un jeu d'enfant de les manipuler alors. Comme c'était drôle, et comme c'était rassasiant, ce pouvoir global! Le moindre foyer de colère leur était un festin de roi! C'était là leur soif et leur plus haute satisfaction: la négativité les maintenait en vie et les dopait.

Ils étaient rassemblés dans la même compulsion qui les menaient, leur loyauté allait à celui qui servait le plus immédiatement leur sombres desseins. Cette douteuse fraternité n'était qu'égoïsme à son paroxysme, on scellait des alliances ponctuelles dans le seul but de l'emporter sur la masse ignorante. C'était une meute de loups qui n'allait pas tarder à s'entre-dévorer, la trahison étant une nourriture des plus raffinées à leur banquet satanique.

Ils ne pouvaient pas comprendre, ces êtres dénués d'intelligence, que leur victoire était leur perte. À vouloir toujours plus de pouvoir sur l'autre, on finit par détruire ses proches, comment peut-il en être autrement? Pour demeurer seul au sommet, il fallait éliminer toute concurrence. Ils étaient incapables de partage, l'amour était leur poison. Ils avaient soif de haine.

Leur mépris grandissant, ils ne prenaient plus la peine de se cacher. Ces pauvres imbéciles gobaient tout, on y allait de plus en plus carrément. Le soit-disant terroriste kamikaze écrasait un avion détourné sur les tours avec ses papiers d'identité sur lui. On ne retrouvait pas une once de sa dépouille, mais son passeport était retrouvé intact sur les gravats. Comme ils avaient ri, ce jour-là!

Grâce à cela, la population ouvrait les yeux, constatait que ceux qui avaient le pouvoir ne l'utilisaient pas pour le bien de la communauté. Un peu hébétés, étonnés peut-être de n'avoir pas compris plus vite, ils avaient vite constaté que la rage et la haine ne faisaient que renforcer le pouvoir de la sombre élite. Il fallait trouver une autre solution.

Ensemble.
La notion faisait son chemin dans les consciences. Il fallait écarter la peur de son voisin, retrouver la confiance, et ensemble, faire basculer les choses. Reprendre son pouvoir individuel, mais pas sur les autres. Son pouvoir de décision, son pouvoir de création. Et puis ensemble, en masse, avancer vers le sommet. Les grignoter par le bas, en les aimant, en émanant amour et lumière. En les privant de leur nourriture préférée —la haine— en ne cédant pas aux bas instincts. Pas facile, car on en était arrivé à se méfier de tous, surtout de ses plus proches. On était devenu cynique, on scandait des mantras paralysants: "ça ne changera jamais, l'homme sera toujours un loup pour l'homme". Encore une de «leurs» programmations, encore une de leurs victoires.

Ensemble. Le concept se construisait. La vibration était nouvelle —ou très ancienne—, elle était surtout naturelle à cet être conçu pour incarner l'amour.

Ensemble, ce n'était pas nier son individualité le temps d'une guerre en uniforme pour emporter une victoire dont les bénéfices allaient nous échapper, et les dommages nous marquer à vie. C'était leur notion à «eux», une illusion, une manipulation de plus.

Ensemble, c'était engager son être tout entier dans une création collective fructueuse, mettre ses talents au service d'un projet commun où les génies se stimulent mutuellement et où le résultat final dépasse les imaginations individuelles les plus folles. Chacun y trouvant largement son compte, et plus encore, la société devenait enfin source de bonheur.

Ensemble. Le mouvement était lancé, le tsunami allait tout balayer.
Ensemble, ils reprenaient leurs pouvoirs et créaient un monde de beauté et de bonté, et cette bonté affamait les loups.

Les loups hurlaient, paniqués. Dans un sursaut désespéré, ils se nourrissaient de leur propre angoisse, de leur propre sang. Les loups, dans leur agonie, faisaient, sans le vouloir, un grand cadeau aux humains. La volonté de les séparer avait eu l'effet contraire: les humaines se rassemblaient dans une confiance retrouvée, dans une fraternité oubliée, il créaient une une solidarité fertile encore jamais expérimentée.

Trois jours de noirceur pour ceux qui ne savaient pas vouloir autre chose que le pouvoir. Trois jours de désintégration physique, leur corps ne résistant au taux vibratoire qui s'élevait en flèche. Quand ils furent en cendres, un vent souffla qui les dispersa.

Ce fut la fin du monde des loups.
On était le 21 décembre 2012



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