Le paradis TERRESTRE... Si on s'y mettait ?

vendredi 27 juin 2014

Implication

TU DEVRAIS ÉCRIRE


Un chapitre écrit avec peine. Mon héroïne souffre, je revis des souffrances à travers elle, une fois de plus, je m’identifie à elle.

Stop! Il s’agit des souffrances l’héroïne et non des miennes. Je respire et je m’extirpe de mon personnage.

Ça circule mieux.

Je reprends à distance en me pénétrant de l’idée qu’elle n’est pas moi et réciproquement. Elle surmonte sa peine et je la marie. Je change les participants. Ce ne sont plus les membres de ma famille, mais des têtes nouvelles que je ne connais pas. Je les habille différemment, tiens, et si je changeais de saison? Oui, je déplace la cérémonie de juillet à un bel été indien d’octobre. C’est encore mieux.

Le flot coule à nouveau.

En rouge. Je la marie en rouge. C’est d’abord un velours rouge qui apparaît sur mon écran intérieur, le même velours que celui de ma robe de Noël quand j’avais onze ans, la première fois que je me suis sentie princesse.

Du lamé! J’ai toujours rêvé d’une robe en lamé. Ça existe, le lamé rouge? Je google «lamé rouge» sur le web à la recherche d’images. Woah! Des splendeurs! Cramoisi. Il sera cramoisi, le lamé de la robe de l’héroïne. Je la fais sexy, cette robe. Une robe …bustier — Voilà, je ne trouvais pas le mot. Une «robe-bustier». Je corrige la description alambiquée que j’avais écrite faute d’avoir trouvé le terme qui m’échappait, et je modifie une ou deux phrases.

Elle s’avance vers son homme, je la fais féminine et sensuelle, cette femme en lamé cramoisi, après tout, le mariage, c’est aussi horizontal. Elle est belle, la mariée du jour. Pas de soutien à cette gorge encore jeune et un décolleté qui suggère toujours une belle capacité aux galipettes. C’est elle, soudain, qui me souffle de lui retirer sa culotte. Je l’imagine au dernier moment, virer cette unique pièce de sous-vêtement, sinon, elle aurait porté un body, c’est sûr, parce que sous du lamé, le moindre sous-vêtement doit se voir. Tiens, au fait, je n’en sais rien. J’ajoute mentalement «me payer une robe en lamé» sur la liste de mes envies. Je n’épilogue pas sur la nudité sous la robe, le propos du chapitre est la célébration du mariage et non pas la nuit de noces. — Pourtant, c’est tentant et facile à écrire.

J’en étais où? Célébration de mariage. Ils vont dire des choses très belles, ces amoureux. Je veux de l’ample, de l’emphase, du grand. Je veux une célébration originale, je sais que j’ai cela quelque part, dans des textes traditionnels. Je place deux astérisques dans mon texte pour me rappeler que je veux chercher ces références. Pas maintenant, je veux aller au bout de mon inspiration, j’étofferai plus tard. Je décris encore les invités, j’ajoute un élément de décor. Je fais avancer la promise vers son homme. La scène est très réussie, je me prends à mon récit, j’en suis toute émue. Et contente de moi, j’ai bien travaillé.

Bon, et après?

Un bruit de klaxon me ramène à la réalité. Je regarde l’heure, il est sept heures. J’ai été réveillée à cinq heures par une ruche d’idées qui vrombissait dans ma tête. L’écriture était là, alors de mon lit, j’ai attrapé l’ordinateur portable et j’ai laissé couler les mots, les jambes au chaud sous la couette et la fenêtre encore ouverte sur un petit matin frisquet. Je bâille. Je repiquerais bien un petit somme. Dehors, la circulation s’intensifie, ce sont les premiers pendulaires. Le soleil pointe. Je sauvegarde mon texte. Je vais me faire un café et ouvrir ma messagerie. C’est lundi, une autre journée et une autre semaine commencent.

Sans me retourner, j’ai abandonné dans une forêt une femme en lamé rouge et un homme en toge blanche, face à face au milieu d’un cercle d’invités tous couronnés de lierre, attendant que commence une cérémonie de mariage selon le rite celtique. J’espère pour eux qu’il ne pleuvra pas.
J’ai laissé également des coquilles, le logiciel me les souligne en rouge et les fautes de grammaire soulignées vert.

Je relis, je vois que j’ai écrit: soulignées vert. Je rajoute en. Ça donne : Le logiciel me les souligne en rouge et les fautes de grammaire soulignées en vert. Cette phrase ne va pas, mais mon mental est saturé. Tant pis, je corrigerai la prochaine fois.


Aucun commentaire: