Le paradis TERRESTRE... Si on s'y mettait ?

mardi 10 février 2015

Jour 77

LE RÊVE

Avec Ana, nous prenons la voiture pour aller faire des courses au village. À peine installées dans l’habitacle, nous explosons toutes les deux.

— Ah, quel affreux bonhomme! dit Ana.
— J’ai cru que j’allais hurler! dis-je. Quel pervers! 
— C’est difficile de ne pas être agressif, avec des gens comme ça. Sa façon de parler,… argh!
— Oui, je devais me retenir de ne pas l’interrompre. Après le sketche d’hier soir, je n’allais pas lui donner une seconde fois la satisfaction de prendre pareillement le pouvoir. Mais c’est dur!

Nous y allons ainsi pendant dix bonnes minutes de critiques acerbes qui nous défoulent.

— Rho, quelle langue de vipère tu fais.
— Et toi, quelle vilaine marchande de poissons.

Nous éclatons de rire.

— Bon sérieusement, qu’est-ce qu’on peut faire?
— Écoute, Arnaud m'a dit qu'il sonder pour en apprendre plus sur lui. Ce mec a dû subir une forme d’abus puissante pour être ainsi. Il va voir s’il peut mieux le discerner. S’il y a moyen, il essayera de les convaincre de séjourner dans notre maison avec leur fille.
— Bah, le timing est mauvais. On n’est pas prêt et c’est typiquement le genre de mec face à qui il faudrait être au taquet.
— C’est vrai…
— En même temps, il y a un truc auquel on n’a pas pensé: il y aura certainement d’autres cas du même genre où les parents ne seront peut-être pas coopératifs. Il faudra pouvoir accueillir les ados et les aider à faire face à leurs parents dysfonctionnels. Ça ouvre une autre perspective.
— T’as raison.

Nous réfléchissons en silence un moment. Ana reprend:

— Ça signifie qu’on va aider des ados non seulement à se définir eux-mêmes, à dissiper leur malaise, mais aussi, et surtout, dans ce cas-là, leur donner les moyens de retourner chez eux et de pouvoir faire face aux difficultés. Ça veut dire… les faire grandir vite.
— Oui. Devenir les adultes équilibrés que leurs parents ne sont pas. Pour qu'ils puissent gérer une relation difficile. 
— Voilà.
— C’est un autre programme, ça. C’est ce qui me plaît le plus, je crois.

De retour des courses, nous trouvons Zee et Pablo au jardin.

— Où sont les autres?
— Arnaud a fait l’inventaire de ce qu’il fallait pour terminer le ranch, Viviane et lui sont partis acheter du matériel, de la peinture, tout ça, et il veut voir s’il peut fixer des rendez-vous avec les artisans.
— Quels artisans?
— Un plombier, un électricien, et puis faire venir le mec pour l’eau chaude.
— Cool, ça démarre très fort, dis-je.
— Et Charles et Mathilde? demande Ana.
— Ils sont allés se promener.
— En voiture, alors? Parce qu’elle n’est plus là.
— Oui, Charles a repéré un truc sur la carte et déclaré qu’il voulait aller visiter.
— Quoi?
— J’en sais rien, ce mec m’énerve. Quand j’ai compris qu’ils partaient, j’étais plutôt content, tu vois. Ce qu’il fait de sa journée, je m’en fous.

C’est son tour de lâcher la pression. Pablo, grand sage, ne dit rien.

— Ça ne t’énerve pas, toi? demandé-je.
— Non. Mais je comprends votre réaction. Il vient chercher nos bas instincts, ce monsieur. Moi, je ne lui parle pas, c’est tout. Mais c’est parce que je peux. Si j’étais impliqué comme vous, sûrement que je ne serais pas aussi cool.
— Tu es un grand sage, Pablo, lui dis-je en souriant. Merci d’être avec nous. T’ai-je déjà dit à quel point j’apprécie ta présence?
— Non, pas vraiment, alors je suis content que tu me le dises, parce que j’avais l’impression que tu ne m'aimais pas, dit-il d’un air blessé tout à fait convainquant.

J’éclate de rire, parce que je ne cesse de lui exprimer mon amour, à ce garçon, et comme toujours, c'est avec abondance.

— Tu me rappelles mon fils, lui dis-je. Tiens, ça me fait penser qu'il me manque, je vais le contacter.











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