Le paradis TERRESTRE... Si on s'y mettait ?

dimanche 22 février 2015

Jour 89

LE RÊVE

Il y a soudainement beaucoup de monde au domaine qui commence à vraiment ressembler à une maison du Réseau. C’est joyeux et dynamique. Le printemps est magnifique et la température grimpe tous les jours. Je peux enfin pratiquer mon activité préférée, le petit déjeuner aux aurores avec les oiseaux dans la cour. Je me fais un bon café que je vais déguster sur la terrasse. Je devrais dire la cour, tellement cet espace est grand. J’y retrouve Ana, déjà debout elle aussi.

— C’est cool, ce qu’ont fait les jeunes, hein?

Nous avions disposé des tables pêle-mêle sous le platane et d’autres au soleil, on aurait dit une jolie terrasse de restaurant. Dans l’après-midi, les jeunes ont décidé de les placer en rond, «comme un banquet des Gaulois» a dit l’un d’eux. Désormais, c’est un grand cercle de tables dont la moitié est abritée par la ramure de l’arbre. 

— C’est une super idée, dit Ana. Il faudra trouver des parasols pour le cas où nous serions complets, en plein été. 
— Je crois qu’ils ont déjà eu l’idée. Il me semble qu’ils sont sur le coup. 

Quatre jeunes arrivent du ranch avec des plateaux de petit déjeuner chargés de plein de bonnes choses.

— Bonjour. Vous voulez de la brioche?
— Bonjour. Très volontiers.

Il y a Pablo, toujours levé tôt, Etienne, Antoine et Amélie. Un peu plus tard, d’autres arrivent et garnissent la table avec du café frais, des jus de fruits. Je suis toujours fascinée de voir comment la spontanéité permet de composer des repas excellents et curieusement tout à fait équilibrés. Camille nous rejoint avec des crêpes qu’elle vient de faire. 

— Que deviens-tu, Amélie, depuis le temps qu’on ne s’est pas vues? demandé-je.
— Je termine ma formation de sage-femme. C’est pour ça que je suis venue dans le coin, je vais passer six mois avec une chamane et j’aurais fini mon initiation. Enfin, c’est surtout une herboriste, mais elle connaît bien la nature, elle va nous enseigner les courants telluriques.
— Sage-femme? demande Etienne. C’est quoi?
— Je vais mettre au monde les enfants.

Ce métier qui se perdait retrouve ses lettres de noblesse depuis plusieurs années. Ce sont elles, et non plus les médecins, qui aident à l’accouchement dont on a complètement revu la conception. 

Au plus tard à huit mois de grossesse, mais souvent dès le quatrième mois, la future mère choisit sa sage-femme. Elles vont alors cohabiter jusqu’au moment de la naissance, afin de bien se connaître. Ensemble, elles vont se préparer à l’accouchement, bien sûr, mais le rôle de la sage-femme est également d’aider la mère à être bien dans son corps, à avoir un bon contact avec son bébé encore dans le ventre. Elle dispense également des conseils de diététique, des massages et du réconfort moral à l’occasion. On s’est rendu compte qu’il est primordial qu’un lien affectif fort soit établi très tôt entre les parents et l’enfant. Depuis qu’on procède ainsi, les complications à l’accouchement ont pratiqué disparu. 

— Le dernier mois, en général, on le passe dans une maison d’accueil des bébés, explique Amélie.

La future mère s’installe dans l’une de ces maisons du Réseau spécialement conçues pour l’accueil à la naissance. Il y a une proportion à peu près égale de mère célibataire et de parents, la notion de couple parental ayant elle aussi drastiquement changé ces dernières années. Tout y est prévu. Des jolies habitations fonctionnelles, des salles de relaxation, des cabines de massage, des bassins d’eau chaude et deux salles d’opération à la pointe du progrès de néonatologie pour les éventuelles complications avec du personnel compétent à demeure. Les rôles ont changé, c’est la sage-femme qui procède, le chirurgien n’intervenant qu’en cas de besoin. Certaines sages-femmes vont même devenir chirurgienne pour pouvoir faire face à toutes les éventualités. 

Les pères sont spécialement considérés. Ils sont préparés à ce qu’ils vont vivre s’ils décident d’assister leur femme. Là encore, on accompagne mieux ce processus. Dans le passé, on s’est rendu compte que certains hommes étaient traumatisés par la naissance de leur enfant. On a retiré la culpablité du choix d’un homme de ne pas être là, tout comme on a aidé les femmes à savoir vraiment ce qu’elles veulent, certaines étant encombrées de la présence de leur compagnon pendant ce moment. Le choix est désormais beaucoup plus librement consenti, permettant une meilleur gestion émotionnelle de l’événement pour tout le monde. 

Amélie raconte son métier avec ferveur. On sent une vraie vocation chez elle. 

— Moi, je veux me spécialiser dans les plantes pour aider tout au long de la grossesse et de l’accouchement, mais surtout, je veux apprendre la vouivre. 
— C’est quoi, ça?
— Les courants telluriques, pour trouver les meilleurs endroits pour faciliter l’accouchement. Les maisons d’accueil sont construites sur des noeuds favorables, mais j’aimerais accoucher les femmes chez elle, au meilleur endroit pour l’arrivée du bébé. 

Elle nous explique que la formation dure cinq ans pendant lesquels elle a appris tout ce qu’il faut savoir anatomiquement de la grossesse et de l’accouchement. On apprend le massage, la relaxation et diverses techniques du genre hapnotomie. 

— Il y a la théorie et la pratique juste après. On passe quelques jours ou semaines à étudier quelque chose et on le met en pratique tout de suite. 
— Comme quoi, par exemple?
— Ben, par exemple, retourner un bébé qui se présente par le siège.
— Tu as déjà fait cela?
— Plusieurs fois. 







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